– Pékin sur Seine –
Les artistes chinois à Paris par Michel Duvail
Surprise en découvrant l’exposition, je m’attendais à voir la production d’artistes contemporains chinois. Je n’avais pas été assez attentif au sous-titre et avais eu une lecture trop contemporaine de l’affiche représentant une petite fille à la « bonne bouille ».
L’exposition du musée Cernuschi met en lumière des œuvres au carrefour de la peinture occidentale – tendance montparnasienne de l’entre deux guerres – et de la peinture traditionnelle chinoise. Soixante-dix peintures, une dizaine de gravures et de dessins et quelques sculptures attestent des influences des séjours parisiens sur toute une génération d’artistes chinois se situant ainsi au confluent des traditions culturelles chinoises et européennes. Ce qui marque picturalement dans cette exposition c’est l’agrégation des techniques picturales chinoises et occidentales. Rien que pour cette mixité, cette exposition mérite le détour.
Quelques artistes ont particulièrement attiré mon attention.
Une superbe série d’animaux simplement croqués par Xu Beihong à l’encre et couleurs sur papier. Des chevaux au galop, un coq, des pies, un buffle dont se dégagent une énergie, une vitalité tracées avec une économie de moyens époustouflante. La décomposition du mouvement des chevaux font presque penser à des peintures anatomiques. Les nuances de l’encre, l’énergie et la sureté du trait de pinceau réussissent à faire jaillir un tel réalisme que les chevaux donnent l’impression de vie. Une lecture symbolique peut nous faire penser à la résistance du peuple chinois face à l’occupation japonaise et à sa volonté de résistance.
Ling Fengmian en quelques traits d’encre représente un philosophe solitaire contemplant des bambous. D’une manière admirable le peintre réussit à marier la tradition chinoise et son atmosphère poétique avec la modernité occidentale. La figure du sage décrite avec une forte concision et une simplification extrême des formes. Le choix du format du tableau est également une rupture avec les formats chinois.
Mais l’exposition est à surtout à voir pour les subtils et sublimes nus de la peintre Pan Yuliang. Des postures délicates de nus qui évoquent l’introspection, la maternité, l’amour, la fragilité. Deux œuvres sont particulièrement intéressantes : le nu au rouge à lèvres et le nu au peignoir rouge. On pense parfois à Modigliani et on se pose la question de son influence sur l’artiste que l’on a plus généralement qualifié de Manet sino-française. Un style unique : raffiné, délié, léger donne des tableaux très doux à forte charge sensuelle. A nouveau un mélange de technicité inter-culturelle : l’impressionnisme associé au Baimiao (le dessin au trait).
Pan Yuliang – Nue au peignoir rouge – Musée Cernuschi
Des grands kakemonos donnent des informations biographiques très intéressantes sur les artistes présentés et leur séjour parisien.
On peut, en quittant l’exposition, penser avoir vu un condensé d’interprétation chinoise de l’art occidental de la première partie du 20ème siècle : impressionnisme, fauvisme, figuratif, abstraction. Face à cette effervescence picturale il faut un ceratin pour s’approprier l’exposition
Les regrets: le manque d’espace pour le nombre d’œuvres exposées et la mise en scène quelconque.
Informations Pratiques
Musée Cernuschi
7 avenue Vélasquez – Paris 8ème
01 53 96 21 50
Jusqu'au 31 décembre
Tous les jours sauf lundi et jours fériés de 10h à 18h
7 euros plein tarif
5 euros tarif réduit